L’essor des voitures électriques autonomes connectées et leur dilemme éthique

L’industrie automobile connaît un profond changement avec l’arrivée de l’électrification, de la conduite autonome et de la connectivité. Ces trois facteurs obligent les constructeurs et équipementiers automobiles à repenser le fonctionnement des véhicules du futur et de leur utilisation. L’arrivée des voitures électriques autonomes et connectées va changer nos habitudes et bouleverser le secteur du transport.

Chaque année, la croissance de la population mondiale qui va vivre dans des zones urbaines, augmente et entraîne ainsi un accroissement des embouteillages, de la pollution et de la consommation de l’énergie. La pollution et le changement climatique sont partiellement provoqués par les véhicules actuels qui émettent du dioxyde d’azote, du dioxyde de carbone, et des particules fines avec les moteurs diesels. Face à ces problèmes, les véhicules électriques se sont vite imposés comme une bonne solution pour réduire les émissions de CO2 afin d’améliorer la qualité de l’air.

Lors de ma visite au salon mondial de l’automobile, j’ai pu constater cette tendance des véhicules électriques. En effet, la plupart des constructeurs automobiles ont présenté des véhicules électriques lors de ce salon et ont donné un avant-goût de l’omniprésence de la voiture électrique dans l’avenir.

Les véhicules électriques présentent en effet certains avantages :

  1. Economique : le moteur s’use très peu, et a donc une grande durée de vie, peu d’entretien du véhicule électrique car peu d’éléments mobiles.
  2. Pratique : plus simple d’utilisation, pas d’embrayage, pas de boîte de vitesses.
  3. Propre : silencieux, ne pollue pas.

Aujourd’hui, certains véhicules sont semi-autonomes avec des systèmes d’aide à la conduite (système ADAS) qui permettent de simplifier la conduite et d’améliorer l’attention du conducteur. Ces systèmes d’aide à la conduite ont pour principaux objectifs d’alléger les tâches du conducteur et d’assister le conducteur dans sa perception de l’environnement (détection des collisions, des dépassements, des piétons, des panneaux de signalisation, etc.). Ils peuvent ainsi élargir le champ de vision du conducteur, alerter le conducteur sur un dépassement de vitesse ou un franchissement de ligne. Ces systèmes peuvent même proposer un copilotage électronique avec des systèmes anticollisions pour par exemple garer la voiture automatiquement en mesurant l’espace disponible grâce à ses capteurs. Je pense donc que l’arrivée des voitures autonomes n’est plus qu’une question de temps et verront le jour dans un futur proche.

Une voiture autonome est un véhicule capable de rouler sur la route sans l’intervention d’un conducteur. C’est un véhicule qui est équipé de nombreux capteurs comme des capteurs à ultrasons, des caméras et des lidars afin de percevoir son environnement. Les données récupérées par les capteurs sont traitées par des logiciels et des processeurs qui permettent de faire de la fusion de données afin d’observer son environnement et de détecter d’autres véhicules, des obstacles, des panneaux et des limites de chaussées. Ensuite des algorithmes d’intelligence artificielle vont décider de l’action à effectuer sur les commandes du véhicule (volant, accélérateur, frein, etc.).

Les statistiques indiquent que 90% des accidents de la circulation sont dus à des erreurs commises par le conducteur. Ce qui renforce l’idée de généraliser les véhicules autonomes afin de réduire ces accidents.

Beaucoup de constructeurs automobiles et des géants du web, du logiciel et de l’électronique se sont donc engagés dans les technologies de conduite autonome et à développer un véhicule autonome.

Parmi les sociétés dans le web, le logiciel et l’électronique, on peut parler de Apple, Baidu, Google, Microsoft et Nvidia.

  • Apple se lance dans le secteur des voitures autonomes et connectées avec l’Apple Car. Le projet se nomme “Titan”, Apple investit beaucoup dans les technologies d’apprentissage et d’automatisation des voitures, et voudrait présenter l’Apple Car avant 2020.
  • Baidu, le moteur de recherche chinois s’est allié avec BMW pour sortir un prototype qui a été expérimenté en décembre 2015 avec une BMW Série 3 autonome qui a roulé 30 kilomètres autour de Pékin. Baidu compte commercialiser et produire en masse des véhicules autonomes dans 5 ans.
  • Google continue à améliorer leur projet Google Car qui se divise en deux types de véhicules autonomes qui sont les véhicules de série modifiés par Google (Toyota Prius, Lexus, Chrysler) et des véhicules électriques et autonomes entièrement conçus par Google.
  • Microsoft, veut aussi contribuer dans la conduite autonome, et travaille avec Volvo pour adapter leur casque de réalité augmentée, HoloLens, pour l’automobile.
  • Nvidia a développé un ordinateur de bord dédié aux véhicules autonomes, en dévoilant le Nvidia Drive PX2 au CES 2016. La puissance de calcul de cet ordinateur de bord est de 8 TeraFlops, ce qui permet de lancer des algortihmes de machine learning et de fusionner les données des différents capteurs embarquées dans les véhicules autonomes.
  • Uber a recruté les ingénieurs de l’université de Canergie- Mellon pour mettre en place leurs véhicules autonomes et va faire des tests à Pittsburgh.

Les constructeurs et équipementiers automobiles comme Audi, BMW, Bosch, Valeo, Ford, Honda, Hyundai, Mercedes-Benz, Renault-Nissan, PSA, Tesla, Toyota et Volvo préparent leur entrée dans le secteur des voitures autonomes.

  • BMW avait dévoilé son prototype iNEXT au CES 2016 à Las Vegas.
  • Audi avait développé plusieurs prototypes de véhicules autonomes et comptent commercialiser son système Auto Piloted Driving déjà intégré dans ses berlines haut de gamme A6, A7 et A8.
  • Bosch avait travaillé avec Tesla sur deux véhicules Tesla Model S pour les rendre complètement autonomes.
  • Valeo a annoncé que leur système “Cruise4U” sera embarqué dans une voiture et sera testé aux Etats-Unis, à San Francisco puis à Boston, Los Angeles, San Diego, Las Vegas, San Antonio, Miami, New York, Boston, Detroit, Chicago et Seattle.
  • Ford continue à investir dans la mobilité intelligente à travers des véhicules connectés et des véhicules autonomes, ce qui a aboutit à la création d’une filiale Ford Smart Mobility. Ford a testé des véhicules autonomes dans des conditions difficiles comme durant la nuit et sous la neige.
  • Honda teste leurs véhicules autonomes en Californie et propose également des fonctionnalités semi-autonomes (maintien de trajectoire, freinage automatique et vitesse automatique) sur ses modèles Civic.
  • Hyundai continue à travailler sur les voitures autonomes mais pense que l’arrivée des voitures autonomes se fera tardivement.
  • Mercedes Benz veut être à la pointe dans les voitures autonomes, et compte proposer de nombreuses fonctionnalités semi-autonomes dans ses berlines de luxe. Mercedes Benz va aussi se lancer dans le service de limousine de luxe et concurrencer Uber avec son service premium “Uber Black”.
  • Renault Nissan, travaille beaucoup sur les véhicules autonomes, et a dévoilé la Next Two en fin d’année 2015.
  • PSA continue d’investir dans les véhicules autonomes et teste leurs prototypes.
  • Tesla veut être le premier constructeur à commercialiser leurs véhicules 100% autonomes. Leurs futurs véhicules devraient être équipés de quinze capteurs à ultrasons, de huit caméras et de l’ordinateur de bord Nvidia Drive PX2.
  • Toyota investit un milliard de dollars dans la voiture sans conducteur, et travaille avec l’université du Michigan, l’université de Stanford et le MIT (Massachussets Institute of Technology) pour déployer des fonctions intelligentes sur ses véhicules.
  • Volvo continue ses efforts dans les véhicules autonomes et a même présenté un camion autonome dans une mine.

Voici quelques dates prévues pour la sortie de véhicules autonomes:

  • 2018 : Baidu, Tesla
  • 2020 : Google, Nissan, Faraday Future, Volvo, Daimler, Honda, Toyota, PSA Groupe
  • 2021 : BMW, Ford
  • 2030 : Hyundai

Les voitures autonomes sont aussi un bon moyen de transport pour les personnes à mobilité réduite (âge, handicap) qui pourront demander à leur véhicule de les conduire d’un point A à un point B. Le développement des véhicules autonomes pourraient même favoriser le développement de robots taxis, c’est-à-dire, une flotte de véhicules autonomes. L’industrie automobile passerait d’une industrie de biens à une industrie de services sachant que les véhicules resteront la propriété de la compagnie de transport. Les voitures autonomes seront aussi connectées et disposeront d’une connexion internet. Ils pourront informer l’utilisateur et ses passagers, de la météo, du trafic routier et de la formation d’un embouteillage. Ils vont aussi donner du temps aux passagers, ce qui va être une opportunité pour Google et Apple d’introduire des services embarquées comme l’infotainment dans les voitures autonomes.

L’industrie automobile passerait d’une industrie de biens à une industrie de services sachant que les véhicules resteront la propriété de la compagnie de transport.

Cependant, l’arrivée des voitures autonomes va poser un dilemme éthique. Même si les véhicules autonomes vont réduire la pollution, fluidifier le trafic et éviter 90% des accidents de la route, il faudra se demander comment seront programmés les véhicules autonomes quand ils devront choisir entre sauver la vie du passager ou la vie des piétons ?

Pour illustrer ce problème éthique, je vais décrire la situation suivante :

Une voiture autonome avec un passager roule sur la route, puis soudain une dizaine de piétons apparaissent au dernier moment pour traverser la route, rendant inévitable un accident. La voiture autonome n’ayant pas le temps de freiner, va donc devoir faire un choix et ce choix est le dilemme éthique des voitures autonomes. La voiture autonome aura deux choix, sauver la vie des piétons en sacrifiant la vie du passager en s’écrasant dans un mur ou sauver la vie du passager en continuant son chemin en écrasant les piétons.

La morale voudrait sauver le plus grand nombre de personnes, ce qui sous-entend que la voiture autonome achetée peut tuer le passager. Avec cette information, beaucoup de gens ne voudront pas acheter de voiture autonome.

Le dilemme éthique de la voiture autonome amène ainsi à une situation paradoxale : avec un logiciel programmé pour sauver le plus grand nombre, l’adoption de la technologie de la conduite autonome va être freinée alors qu’elle a pour objectif de réduire le nombre d’accidents.

A l’heure actuelle, les constructeurs automobiles ne se prononcent pas encore sur ce dilemme éthique mais la tendance des constructeurs est de privilégier la sécurité des passagers dans la voiture autonome. Par exemple, Mercedes a décidé de prioriser la vie du passager, le logiciel sera programmé de telle sorte que la survie du passager est la priorité numéro 1. Il n’y a pour l’instant, pas de législation sur ce dilemme éthique, pas de consigne sur la morale des voitures autonomes.

Le dilemme éthique de la voiture autonome amène ainsi à une situation paradoxale : avec un logiciel programmé pour sauver le plus grand nombre, l’adoption de la technologie de la conduite autonome va être freinée alors qu’elle a pour objectif de réduire le nombre d’accidents.

Je pense que dans l’avenir, la gestion de ces problèmes éthiques devra être résolue entre trois groupes qui sont les clients qui achètent ces voitures autonomes, les constructeurs automobiles qui programment le logiciel et le gouvernement qui pourra réguler les différents algorithmes que les constructeurs proposeront et que les consommateurs pourront choisir.

 

Pour conclure, les véhicules autonomes vont bouleverser le secteur du transport et la mobilité au quotidien. Il est difficile de savoir quand les voitures autonomes intégreront nos modes de vie, mais je pense que dans deux décennies, les voitures autonomes vont faire partie de notre quotidien.

A propos Nicolas Chen 63 Articles
Nicolas Chen est le Fondateur et Président de OpenDeepTech. Il est aussi un ingénieur développement logiciel qui a travaillé dans de nombreuses entreprises de divers secteurs tels que l'automobile, l'aéronautique, le médical, la robotique, la data science, le machine learning et le deep learning.

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